PROPOS EN GUISE D’ELOGE AUX LIONS DE LA TERANGA

PROPOS EN GUISE D’ELOGE AUX LIONS DE LA TERANGA

SPORT, JEUNESSE, ET CITOYENNETE

C’est une équipe sénégalaise combative qui a été sacrée championne d’Afrique de football ce 06 février 2022 à Yaoundé. Au terme d’un tournoi qui a cristallisé les attentions pendant près d’un mois, le Sénégal trône sur le toit du football africain et confirme son renom de nation de football. Ce sacre, qui porte la signature de la jeunesse, s’est révélé être un moment d’expression d’une fierté nationale. La diversité des manifestations et la cohésion suscitée reposent le débat sur les rapports entre le sport, la jeunesse et la citoyenneté pour un pays comme le Sénégal.

Le drapeau au centre de la manifestation

Vert, jaune et rouge ! Les couleurs nationales ont constitué graduellement l’élément central du décor des espaces publics du pays, au fur et à mesure de la marche vers le sacre. Ce ralliement autour du triptyque a symbolisé tant l’intérêt pour le football que le sentiment d’appartenance à la nation. Si la sacralité du drapeau a ses rigueurs pour l’Etat et ses institutions, notamment les forces de défense et de sécurité, elle demeure également pour la masse de citoyens tout en s’adaptant à son ingéniosité et aux aspects festifs des compétitions sportives.

Le recours au drapeau en ces moments de compétition, au-delà du symbole, fait du sport un outil de construction de la citoyenneté. En se concevant en droits et devoirs, la citoyenneté traduit l’attachement réciproque entre un Etat et sa population. C’est une singulière destinée, qui les lie dans la prospérité et dans la ruine, dont il faut soigner les contours à travers un sens élevé de la responsabilité. La compétition sportive, en cristallisant l’attention populaire ravive cette fibre nationale et s’appuie sur les exigences individuelles et collectives pour consacrer la nation.

Cohésion nationale

L’espace public Sénégalais est, par-delà les opinions, un choc d’humeurs. La diversité des acteurs et des intérêts déteint sur le commerce des rapports et occasionne naturellement des clivages préjudiciables à la prise en charge des enjeux et défis nationaux. Au sortir d’une campagne électorale relativement tendue en ce début 2021, le parcours de l’équipe nationale du Sénégal à la CAN a permis de taire les divergences et de célébrer ensemble la consécration du pays.

Les politiques, acteurs de premier plan, ont su, à travers l’appel opportun du Président de la République, donner forme à la cohésion nationale et faire de ce sacre une affaire de tous. Le sens d’une telle démarche est symbolique à plus d’un titre. D’un côté, elle ancre le politique au service de la réussite nationale, son dessein véritable. De l’autre, elle confirme sa capacité à se hisser au-dessus des polarités et à faire bloc pour la nation qu’il est appelé à servir.

La cohésion induite par le sacre enjambe les acteurs politiques et se ressent dans les différents pans du pays. Dans un contexte de crise sécuritaire régionale, où les acteurs subversifs s’appuient sur la pauvreté et le sentiment d’exclusion, la CAN a permis un sursaut d’appartenance nationale dans toutes les contrées du pays. C’est à ce titre que le cas de la Casamance mérite d’être cité. Dans un contexte tendu par la prise en otage de quelques militaires sénégalais par une faction du MFDC, la ferveur suscitée par la victoire du Sénégal dans toutes les régions de Casamance, arrachée au bout par un enfant du terroir, constitue une éloquente réponse aux interrogations sur les velléités indépendantistes de populations qui ne rêvent vraisemblablement que de prospérité dans une nation sénégalaise.  

Le sport au service de la société

Si le sport est facteur de cohésion sociale, c’est aussi parce que les sportifs sont des acteurs sociaux non négligeables. Dans un pays comme le Sénégal, marqué par des inégalités sociales, le sport reste une alternative pour l’ascension sociale. Les sportifs qui se hissent au haut niveau deviennent souvent des ambassadeurs et portent volontiers un engagement citoyen auprès de leurs communautés.

Les investissements colossaux du footballer Sadio Mané ou du basketteur Gorgui Sy Dieng dans les domaines de la santé et de l’éducation traduisent cet engagement pour assurer des services sociaux importants et vecteurs d’inclusion sociale. Cette approche structurelle a un fort potentiel d’impact et accompagne l’action de développement socioéconomique dévolue à l’Etat.

Le sport apparait ainsi comme un vecteur de construction et de manifestation de la citoyenneté. Cette construction interpelle, en priorité, les jeunes pratiquants qui peuvent en tirer le sens de l’engagement, l’esprit du travail collectif, la rigueur de la compétition et l’humilité face aux succès. La manifestation de la citoyenneté se consolide, à la fois, dans les moments intenses de la compétition où les couleurs du pays sont défendues, et dans les actions de reconnaissance à la communauté nationale.

En brillant dans les compétitions internationales, les sportifs animent un vecteur non-négligeable de la diplomatie publique. Ainsi invité dans l’agenda médiatique, le Sénégal se montre et se vend à travers des aspects qu’une communication contrôlée pourrait mieux affiner. Dans la perspective d’une meilleure contribution du sport à la construction de la citoyenneté et au dynamisme de la jeunesse, il convient de faire quelques recommandations :

  • Faire les états généraux du sport sénégalais: C’est une occasion de cibler les sports à fort potentiel socio-économique et adaptés à la société Sénégalaise. Ils permettront également de mieux structurer l’action du ministère des sports qui est souvent qualifié de ministère du football.
  • Développer le concept sport-étude: Parallèlement à la pratique du sport à l’école, il est souhaitable d’investir et d’accompagner les investissements dans les établissements qui concilient les études et une pratique encadrée du sport. Cela permettra surtout de faire des jeunes sportifs formés de véritables acteurs de la vie sociale, économique et politique.
  • Initier un groupe de travail interministériel pour capitaliser sur la mise en agenda médiatique des compétitions sportives au profit du tourisme, du transport aérien et d’autres types d’investissement.

Lamine Bara LO
Direction de la Recherche et de la Publication
Centre des Hautes Études de Défense et de Sécurité – CHEDS

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